Achever un projet laisse toujours un petit goût de frustration. On travaille sans répit pendant des mois, voire des années, des idées géniales nous viennent à l'esprit, alors on les note, on les met en œuvre, on regarde ce que ça donne, et puis finalement ces idées géniales nous paraissent beaucoup moins géniales, alors on revient en arrière, on réessaye, ça marche, mais ça pourrait être mieux, donc on reprend, on doute, on fonce, on redoute, on refonce. Bref, c'est un enfer.
Et pourtant, sans cet enfer, sans cette occupation permanente de l'esprit qui fait qu'on se retrouve à se lever de table pour noter une idée qui nous sera venue sans prévenir (pour ceux qui prennent le temps de manger), sans cet accaparement total et continuel, la création, pour moi, ne serait pas la création.
Et on a beau savoir que tout ce travail a une seule et unique finalité : la concrétisation, et que toute notre énergie est dirigée vers ce but, quand vient le moment de rendre notre copie, quelque chose en nous résiste. Quelque chose qui ne veut pas en finir.
Alexandre Astier disait récemment : "J'aime faire, je n'aime pas finir". C'est un parfait résumé de la situation. Le travail du créateur, avec tout ce qu'il a d'excitant, d'enivrant, mais aussi de douloureux et de désespérant, c'est ça qu'aime le créateur. Il l'aime d'un amour contradictoire, torturé. Il l'aime comme quelque chose de tellement vital qu'il sait qu'aucune souffrance ne lui fera renoncer à lui. Il l'aime, parce que c'est ça qui l'anime. Preuve en est : quand son œuvre est achevée, la création lui manque.
En résumé, ma bande dessinée est terminée, et elle me manque déjà.
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